Rompre avec le casse tête des tarifs
Se lancer en tant que photographe professionnel est une aventure passionnante mais qui peut très vite s’arrêter si on ne prend pas conscience d’être tout autant un chef d’entreprise qu’un artiste. Quelque soit la taille d’une entreprise, si elle veut durer dans le temps, elle doit être profitable. Autrement dit, vous devez gagner de l’argent pour vivre de votre passion, pour amortir ou renouveler votre matériel, pour investir dans un studio, une formation… et aussi pour vous libérer du temps pour VOUS, pour votre famille, pour votre vie sociale.
J’entends régulièrement nombre de photographes qui tout d’un coup prennent conscience que leur passion fini par gâcher leur vie de couple, de famille, parce qu’ils n’ont pas su dire non à certains projets, parce que leurs tarifs sont trop bas et qu’ils sont obligés de faire beaucoup de séances pour compenser, ou simplement parce qu’ils n’ont pas su équilibrer vie familiale et professionnelle en posant certaines limites. Quand on en prend conscience assez tôt, on arrive à redresser la situation et on en sort un peu plus fort, parce qu’on sait ce que l’on ne veut plus !
Combien valent mes photos ?
Lorsque l’on débute, on a tendance à assimiler son tarif comme étant sa propre valeur. On se dit : est ce que mes images valent vraiment ce tarif ? Est ce je vaux ce prix ?. Dans cette question, on ne voit que l’image finale, on oublie tout ce que l’on a investit pour arriver à faire cette image :
- L’achat de matériel (appareil photo, optique, sonde de calibration, logiciels…),
- Le temps passé à apprendre, voire le coût des formations,
- Le temps passé à prendre cette photo, à la post-traiter…
- Le marketing engagé pour trouver des clients (logo, site web, SEO, temps passé à animer vos pages Facebook, à trouver des partenaires…),
- La démarche commerciale pour convaincre votre client, caler la séance et le satisfaire.
Pour afficher un tarif qui soit rentable, vous devez le comparer à vos charges, investissements et au salaire que vous souhaitez gagner. Pour cela, il y a une méthode simple que je vous invite à consulter dans cet article : calculer votre CODB (Cost of Doing Business).
Si vos images ne vous paraissent pas du tout à la hauteur d’un tel tarif, c’est que ce n’est peut être pas encore le bon moment pour vous lancer, que vous devez encore travailler votre technique, votre relation client, votre marketing ou investir dans du matériel professionnel…
Si vous avez lancé votre entreprise avec des tarifs en dessous de votre CODB, ou que vous souhaitez diminuer le rythme des séances/reportages annuel pour que vivre de votre passion soit aussi beau que vous l’aviez imaginé, vous allez certainement devoir augmenter vos prix. C’est un moment difficile ou l’on a peur que les personnes qui nous suivent ne soient pas prêtes à adhérer à nos nouveaux tarifs, peur de ne plus avoir de clients du tout !
Voici 5 bonnes raisons d’optimiser vos tarifs et de l’assumer :
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Ayez confiance en vous.
Cela fait plusieurs mois que vous vous êtes mis à la photographie de façon plus intensive ou professionnelle, votre prorata de photos réussies sur une séance comparé aux nombres de photos prises ne cessent d’augmenter, vous devez être fière de vous, non ? Il est toujours plus facile de voir ce qui ne va pas, que de se féliciter pour le chemin parcouru. Pourtant c’est en ayant conscience que l’on évolue, que l’on prend confiance en soi. Il y a quelques mois, il vous fallait peut être 2 heures de séance pour sortir 5 jolies photos et aujourd’hui en 1 heure vous réalisez 20 jolies photos dont 2 « wouhaooo »,cette expertise, cette expérience acquise, justifie totalement de ne plus être payé comme un « novice ». Vous avez travaillé dur pour atteindre ce niveau, cela mérite salaire ;)
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Adaptez votre cible client.
Quand on crée son portfolio, on recherche des personnes prêtent à poser pour nous, gratuitement, ou pour pas grand chose. Vous leur êtes reconnaissant d’avoir accepté de jouer les modèles, et aussi d’autoriser la publication des images pour promouvoir votre travail et vous faire connaître. Mais pensez-vous que ce soit votre cible client ? Soyez réaliste, la plupart temps ça ne l’est pas. C’est primordial d’avoir ces photos, mais si vous voulez vous lancer, vous devez maintenant vous adresser à VOTRE cible client, aux personnes qui seront prêtes à payer pour travailler avec vous. C’est finalement là que le travail commence, que vous devez porter la casquette d’entrepreneur !
Pour cela il va falloir déterminer votre cible, créer un branding et une offre adaptés, animer un blog, être présent sur les réseaux sociaux, peut être trouver des partenaires, avoir un packaging à la hauteur… Bref, c’est le moment de se mettre un peu au marketing, d’aligner votre image de marque avec votre travail et vos prétentions.
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Montez en compétences.
Lorsque vous faîtes des formations, c’est un investissement pour gagner en compétences, et donc par la même pour mieux servir vos clients, pour leur apporter des images encore plus fortes, ou un service de meilleur valeur. Forcément cela peut avoir une répercussion sur vos tarifs. vous pouvez mettre en avant votre souhait de toujours progresser, c’est gage de qualité, de confiance et de professionnalisme. Vos clients (et prospects) apprécieront !
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Bichonnez vos clients et valorisez votre travail.
Lorsque vous augmentez vos tarifs, vous vous adressez à des clients potentiels forcément un peu plus exigeants. Quand on « met le prix », on veut de la qualité, c’est pareil pour vos propres achats certainement. Cela signifie que de la première prise de contact à la livraison (et même après), chaque échange, chaque contact doit être professionnel, et répondre aux engagements que vous promettez (délais, consistance des traitements, petites attentions, suivi…). Observez par vous même la différence de service et d’emballage entre des prestataires de gammes différentes (fleuriste, bijoutier, restaurant…), êtes-vous servi de la même façon chez Zara, Max Mara ou Gucci?
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Déculpabilisez-vous !
Vous avez honte de dire que vous augmentez vos tarifs, vous n’osez pas. Pourquoi ? A partir du moment ou cette augmentation de tarif est justifiée, il n’y a pas de raison de culpabiliser. Il est tout à fait dans les moeurs, de subir des augmentations de prix une (voire deux) fois par an (en janvier ou en septembre de façon générale). N’hésitez pas à avertir vos clients, par un e-mailing dédié, un mois avant la date effective de prise en compte de vos nouveaux tarifs. Si votre augmentation est conséquente, vous pouvez aussi, offrir une réduction à vos clients VIP afin qu’ils continuent de faire appel à vous, tout en prenant le temps de s’adapter à votre nouvelle grille tarifaire.
La politique de prix est un sujet délicat dans la photographie, car il n’y a pas réellement de valeur de référence, ou de stratégie unique. Chacun doit adapter sa formule à son entreprise, à ce qui lui correspond. Certains préfèrent livrer du « tout numérique », d’autres ne livrent que des tirages, ou des livres accompagnés de fichiers numérique basse définition, il y a des modèles économiques basés sur l’émotion de la découverte des images où l’on paie la séance et les produits séparément (avec ou sans obligation d’achat de produits d’ailleurs), et d’autres avec des offres totalement packagées. Ne perdez pas trop votre temps ou votre énergie à regarder ce qui se passe ailleurs. L’important c’est que VOTRE offre soit réfléchie en fonction des valeurs de VOTRE entreprise, de votre cible client, et de vos besoins (CODB). C’est aussi là que vous montrez votre différence, et que vous affirmez la personnalité de votre entreprise !
6 Comments
Superbe article Rachel ! Encore une fois un contenu de grande qualité !
Merci Angeline :)
tout à fait au point Rachel. Dans un language simple et direct qui devrait faire réfléchir plusieurs personnes qui croient que seule une passion suffit. Toutes et chacunes méritent une qualité de vie personnelle et de famille et que cela ne se fasse pas au détriment d’une passion pour la photographie.
Être en affaires comporte des règles qui doivent être suivies autant que la technique photo.
Merci Rachel pour cet article, très complet, clair et parfaitement écrit !