Photographe pour MicroStock
Martine DOUCET est canadienne, et elle travaille depuis de nombreuses années pour le micro-stocks istockphoto.com en tant que « contributeur exclusif ». Avec plus de 2500 photos en stock, Martine nous raconte ici son expérience.
Quel est ton parcours ?
Je suis photographe et communicatrice oeuvrant à Montréal, au Canada.
J’ai reçu mon premier appareil photo à 10 ans, un petit Instamatic de Kodak avec des flashs en cube. J’avais droit à un seul film de 12 poses par semaine :-).
Premier contact avec la chambre noire à l’adolescence, puis quelques cours de photos dans mon programme d’Arts Plastiques au Cégep et à l’Université. J’ai transformé plusieurs salles de bain de mes appartements en chambre noire par la suite.
J’ai bifurqué vers les médias où j’ai eu une carrière de recherchiste, réalisatrice, animatrice et journaliste à la radio et à la télévision avant de revenir à mes premières amours et de créer en 2001 l’émission «Portrait de famille» diffusée sur les ondes de TV5, où je me rendais photographier les familles de personnalités connues du Québec tout en les interviewant sur leur rapport à l’image.
J’ai décidé par la suite de me consacrer principalement à la photo, tout en gardant quelques présences à la radio, notamment avec la chronique «Derrière l’image» à Radio-Canada. J’y raconte la petite histoire derrière des photos célèbres.
On a ici (en Europe) une mauvaise image des micro-stocks, quels sont, pour toi, les avantages de cette façon de travailler?
Cette mauvaise impression est largement partagée ici aussi, mais cela tend à changer. Notamment parce que plus personne n’engage de photographe pour tout ce qui ne représente pas un produit ou une personne spécifique. Et aussi parce que les directeurs artistiques arrivent souvent avec un «mood-board» ou carrément une photo à reproduire tirée d’une banque d’image. J’ai décidé de me joindre à iStock en 2008 car je n’avais plus aucun contrat en photo.
J’y ai découvert un monde en constante effervescence, des talents exceptionnels, une communauté de photographes inspirés, audacieux, imaginatifs. Ce sont eux qui règnent actuellement sur l’imagerie commerciale qui nous entoure. On ne s’en rend pas compte, mais 80% des images qui nous entourent, sur les affiches, les magazines, les couvertures de livres, sur les sites web proviennent de banque d’image micro-stock.
Avec l’avènement du numérique, le monde de la photographie professionnelle a été complètement bouleversé. Tirer son épingle du jeu économiquement est devenu un véritable tour de force. Mais en contribuant à une banque d’image, je m’assure une clientèle mondiale à laquelle je ne pouvais avoir accès auparavant. Même si mes photos se vendent à petit prix, je peux les vendre plusieurs fois et rentabiliser mon investissement. C’est du long terme. Mais j’ai un contrôle complet pour la création, et je montre mes photos au lieu de les laisser sur un disque dur. Ça me donne toujours une raison de continuer à progresser, explorer et tenter de nouvelles choses.
Peut-on vivre de la photo en micro-stock?
Oui. J’ai des amis qui en vivent TRÈS bien. Mais ils sont là depuis plus longtemps que moi. Plus notre portfolio est garni, plus c’est rentable. J’ai pour l’instant près de 3000 images, ce qui me rapporte environ la moitié de mon revenu annuel.
Comment organises-tu tes shootings? Est-ce toi qui gère le stylisme, les mises en beauté…?
Oui. C’est moi qui gère TOUT! Booking des modèles, des lieux, idées de mise en scène, stylisme. Pour la mise en beauté je travaille souvent avec une maquilleuse amie avec qui je fais échange. Pour le moment je ne travaille qu’en TFP, Time for photos. J’achète beaucoup d’accessoires et de vêtements dans les soldes!
Mes modèles sont principalement ma fille, ses amies, ma famille, mes amis, des voisins et des amis d’amis. Je n’ai aucun problème à recruter des modèles, personne n’a de problème à renoncer à ses droits sur l’image en échange de photos. :-) Et c’est drôle, je retrouve de mes photos partout. J’ai vu ma fille sur des placards immenses dans le métro de Paris, en couverture de livres ou sur des journaux. Mon mari dans un magazine, des amies sur la pochette d’un CD. Et plusieurs de mes photos sur des sites web dans toutes les langues.
7 Comments
« Mes modèles sont principalement ma fille, ses amies, ma famille, mes amis, des voisins et des amis d’amis. Je n’ai aucun problème à recruter des modèles, personne n’a de problème à renoncer à ses droits sur l’image en échange de photos. :-) »
Tout est dit …
merci de casser le marché ….
Merci de votre commentaire.
Je me permets de vous demander de quel marché parlez vous ?
Les microstocks nourrissent un besoin d’images pour le TPE et petites PME qui de toute façon n’auraient pas les moyens de payer un photographe + un modèle + un styliste. Ce besoin a été renforcé par Internet, les TPE ont maintenant tout intérêt à y être présentes et se doivent d’avoir des images pros. Les entreprises qui en ont les moyens, ou qui simplement souhaitent se démarquer, ne prennent pas le risque d’acheter des images de microstocks, images que l’on pourrait voir chez le concurrent ou ailleurs. Je crois que c’est juste un autre marché.
Il faut savoir que les photographes contributeurs ne sont pas super bien rémunérés, d’où la difficulté de faire appel à des modèles pros, par exemple, mais aussi de devoir avoir un portfolio très importants. Je pense que les photographes amateurs qui s’improvisent photographe de mariage pour quelques euros, font bien plus de mal au marché et surtout à l’IMAGE des photographes.
Belle journée
Le marché est déjà « cassé » Monsieur Jean-Paul. Depuis 10 ans. En fait, il évolue et prend une nouvelle forme. La photo micro-stock est une alternative.
En effet, le marché est déjà cassé, par des personnes qui trouvent normal de travailler gratuitement et que Jean-Paul a très bien décrites!
Ces mêmes personnes qui pleurent leur perte de pouvoir d’achat dans leur profession.
Mais bon, il semble que la contradiction ne leur apparaisse pas.
Cela s’appelle le nivellement par le bas, et c’est sans limite.
Bon courage!
Je précise que mes modèles ne travaillent pas gratuitement, mais en échange de photos. Le tarif de mes sessions photos part à 500$.
Bonjour,
Un grand merci pour ce témoignage que je ne découvre qu’aujourd’hui.
Et j’espère que vous avez réussi depuis à poursuivre dans cette voie!
Une petite remarque, pour vous apporter tout mon soutien: je suis rédacteur en chef d’une publication territoriale en France (presse institutionnelle), et je travaille à la fois avec deux photographes indépendants, mais aussi avec IStock (GettyImages). Mes photographes réguliers ne sont pas en concurrence avec IStock: j’ai besoin régulièrement de leur « oeil » pour mettre en valeur le territoire de la Ville pour qui je travaille (et qui n’est pas présent sur IStock; c’est une petite commune!). Et sans IStock, je n’aurais pas les moyens d’illustrer certains sujets moins « identifiés »: articles généraux sur le 3e âge, sur le rapport des enfants à l’image, sur les règles de bon voisinage, etc… Merci donc à Martine Doucet pour son travail, et à tous les contributeurs de microstocks! C’est avec les économies réalisées grâce à eux que je peux encore faire bosser des pros à côté; sans cette alternative, je serais condamné à n’illustrer mes propos que par des contributions d’amateurs (il y a toujours un lecteur présent avec son Iphone à la dernière expo du coin, très fier de voir ses supers photos publiées dans le journal municipal!)
Bonne continuation à toutes et à tous!
PS- de nombreux professionnels semblent bien résister dans ce marché « cassé » et « nivelé par le bas ». Étrange…
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